Souvigné et son musée de la vie rurale et de la coiffe (1/3)

Marguerite Morisson aime beaucoup le musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné et elle pense, à juste titre, qu’il mériterait d’être mieux connu. . Aujourd’hui, Marguerite raconte l’histoire de ce musée telle qu’elle l’a vécue. (la suite demain)

Il était une fois… c’est ainsi que commencent toutes les belles histoires…

Donc, il était une fois Souvigné en pays « pèlebois », un petit village du Saint-Maixentais, où l’on passait sans s’arrêter, car à vrai dire il n’avait aucune réputation, ni bonne ni mauvaise d’ailleurs ! On apercevait bien, au loin, le clocher de son église jouxtant la haute toiture de son temple, mais les voitures filaient bon train sans jamais s’arrêter.
Ce que l’on ignorait, c’était l’enthousiasme et le foisonnement d’idées de ses habitants qui voulaient à tout prix faire vivre leur village, parce que tout simplement, ils l’aimaient.

Il y avait au cœur du village, un prieuré du XVe, propriété d’une famille qui souhaitait partir et le vendre… pour en faire un centre de loisirs, avait dit le propriétaire un peu visionnaire !

Marc Guiton, qui fit pour notre Cercle les relevés de Souvigné, était alors maire de son village. Passionné d’histoire, de traditions et de patrimoine, il suggéra de créer une association, indispensable point de départ de tout projet culturel. C’est ainsi qu’en août 1991 sont nés « Les amis du Patrimoine ».
Aussitôt dit, aussitôt fait. Ce serait le musée de la coiffe.
On battit le rappel pour récupérer coiffes, costumes et broderies qui affluèrent à pleins cartons et à pleins sacs.

Mais le patrimoine ce sont aussi les chemins creux, les fontaines, les lavoirs, les petits édifices en péril, les fours, le temple et les cimetières protestants, puisque nous sommes à Souvigné en plein pays huguenot.
On organisa des randonnées, des équipes défrichèrent, nettoyèrent, arrachèrent… Une vraie ruche, un même élan, un même enthousiasme jamais démenti.
Le seul problème, c’était le nerf de la guerre… pas riches les amis du patrimoine ! Il serait trop long de raconter ici toutes les péripéties liées à cette époque héroïque, mais tant de cœur et de dévouement devaient réussir.

Sur une idée d’une élue départementale venue visiter le musée, on fit appel à l’esprit mutualiste lié au département des Deux-Sèvres. Des directeurs de nos mutuelles, nés en Deux-Sèvres, originaires du Saint-Maixentais et d’origine protestante de surcroît, furent sollicités, mirent la main au porte-monnaie et c’est ainsi que les amis du patrimoine se retrouvèrent au Prieuré, dans leurs murs. Bien sûr, il fallut plus de temps à le réaliser qu’à le raconter, puisque ce n’est qu’en 1997 que toutes ces tractations prirent fin !

Mais revenons donc quelques années en arrière. Les coiffes et dentelles affluent, chez Hélène et Marc Guitton. Ils ne savent plus quoi en faire. Jean-Pierre Gaunord qui habite à Souvigné, est donc contacté pour leur venir en aide. Jean-Pierre, c’est le talentueux costumier des « Ballets Populaires Poitevins » créés par l’UPCP, mais c’est aussi le père fondateur du groupe enfantin « Les P’tits Châgnes » de renommée nationale et même internationale et c’est aussi le créateur du festival annuel des « RIFE » de Saint-Maixent, qui réunit chaque année des ballets traditionnels enfantins venus de toute la planète. Donc Jean-Pierre doit avoir une solution.

Depuis 1986, un atelier pour l’entretien des coiffes des « P’tits Châgnes » fonctionne à Saint-Maixent, dans une salle désaffectée de l’école Wilson. Les mamans des enfants ont été sollicitées et certaines ont pris goût à cette activité un peu spéciale, il faut le reconnaître !
En effet, 80 coiffes à entretenir, c’est un travail insurmontable pour une seule personne ! Une équipe est indispensable !
Lorsque les groupes traditionnels de l’UPCP ont été créés entre 1967 et 1972, les lingères professionnelles existaient encore, âgées certes, mais encore efficaces.
C’est ainsi que m’a été donnée l’occasion de les rencontrer et d’apprendre ce qu’elles ont bien voulu transmettre, chacune étant jalouse de son art et persuadée de notre incapacité.
À vrai dire, c’est d’abord l’histoire des coiffes, liée à l’histoire des femmes qui fut intéressante. À une époque où les femmes ne comptaient pas et ne s’exprimaient pas, leur coiffe était en quelque sorte leur carte d’identité.
La richesse et la longueur des rubans révélaient la situation financière du père, les broderies disaient si la fille était célibataire ou mariée et la position des tuyautés pouvait renseigner sur sa religion. Les coiffes de cérémonie étaient particulièrement « bavardes » sur le sujet.

Ensuite, quand on veut aller au bout de l’histoire, il faut se mettre les mains dans l ‘amidon et en apprendre le savant dosage si l’on veut arriver à un résultat.
Mais ceci est une autre histoire.

Un soir, lors de l’atelier hebdomadaire à Saint-Maixent, Jean-Pierre me demande si je consentirais à aller aider les dames de Souvigné « pour faire un musée de la coiffe ». C’était vague, mais original !
Au début de l’automne 1991, je suis donc arrivée à Souvigné où je ne connaissais personne, à part le maire rencontré une ou deux fois aux archives. Je ne savais pas trop ce que l’on attendait de moi.
Ce que j’ai trouvé en arrivant ce furent des sourires, un accueil plus que chaleureux, un enthousiasme extraordinaire… mais aussi des monceaux de « gueneuilles » comme disait Hélène, entassés sur une longue table : des bonnets, les moules en carton, des fils de fer, des dentelles, des guimpes, des caracos, des pantalons fendus et des cache-corsets… sur une hauteur de 80 cm au moins !
Mais autour de la table les visages souriants et confiants d’Hélène, de Jacqueline, de Janine, de Viviane, d’Henriette, de Fernande, tellement sympathiques et amicaux que j’ai dit oui , tout de suite !
Je venais de « signer » un « engagement » ! Et l’on se mit au travail tout de suite.

Premier travail : trier et éliminer ce qui était irrécupérable. On profita de ce tri pour apprendre les noms des différents morceaux composant une coiffe, les reconnaître et les rassembler et surtout garder précieusement les coiffes encore montées qui pourront servir de modèle. J’ai alors proposé de venir chaque semaine pour continuer le travail.
Mais la semaine suivante tout était trié, par pièce et par coiffe, ainsi que les bonnets, les guimpes, les fichus les foulards, les culottes fendues et les jupons etc.
Et cet enthousiasme ne s’est jamais démenti. Quel plaisir ! Chaque semaine, j’allais là-bas comme à la fête ! Chacune prépara son « métier » à tuyauter, et après un lavage délicat de ces fragiles reliques, les tuyautés faits avec aiguilles ou palènes sortirent blancs et fermes de toutes ces mains devenues expertes en quelques semaines.
Pour le montage, il a fallut un peu plus de temps, c’est la partie délicate, celle qui donne son élégance à la coiffe.

Un jour en fin de soirée :
– Allo ! Allo ! Ici c’est Viviane ! Ça va pas !
– Vous êtes malade ?
– Non, Non ! Moi ça va ! C’est ma Malvina qui va pas ! J’arrive pas à lui revirer ses tuyautés sur le devant ! J’vais pas dormir cette nuit ! Y’a l’expo dans deux jours !

Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que ce musée est né d’un enthousiasme partagé. Pendant que les dames se brulaient les doigts dans l’amidon, et repassaient leurs tuyautés, les messieurs collectaient les vieux outils, les vanneries traditionnelles, le matériel de « bugheaille » (lessive), les objets artisanaux et récuraient le Prieuré de la cave au grenier. Les bâtiments hors de service furent remis en état, et un peu plus tard, même la voûte du four fut entièrement refaite par les soins de Gégé, devenu l’homme indispensable.

1992 fut l’année où l’on décida de faire une première expo des premiers travaux. La trésorerie ne permettant pas trop d’excentricités, on fit avec les moyens du bord. On discuta beaucoup, mais le grand jour venu, les visiteurs ont pu admirer une belle collection de coiffes créchoises, de rubans, de dentelles diverses, de fichus et de foulards, ces derniers présentés sur les branches d’un arbrisseau mort. Aujourd’hui certains en sourient, mais c’était mieux qu’un fil avec des épingles à linge ! Ça ne coûtait rien et ça meublait un coin de cette grande salle. Pour occuper ces grands murs blancs, le mari de Janine avait installé une grande carte de France, sur laquelle étaient accrochées les poupées de M. Palissier qui, avant beaucoup, s’était intéressé au patrimoine et aux traditions de notre pays. Les visiteurs étrangers au département, appréciaient d’y retrouver les costumes de chez eux.

Et puis il y avait bien sûr les « Trois Grâces du Poitou », la Créchoise, la Mothaise et la Malvina, habillées dans des costumes de la Marchandelle d’Augé, reconstitués d’après des originaux, installées sur un plateau tournant, de façon à ce qu’on puisse en voir tous les détails. C’est ce tableau un peu défraîchi d’Escudier, qui nous avait inspirées.

Musique, danse et chant dans le monde militaire

Le musée du sous-officier de Saint-Maixent-l’école sera ouvert pour nous lors des prochaines journées de la généalogie les 9 et 10 octobre. En attendant, il organise une journée d’étude le jeudi 23 septembre intitulée « Musique, danse et chant dans le monde militaire ». Le programme est ci-dessous, après l’image :

Gravure d’après « La Répétition » d’Eugène Chaperon

Programme

HorairesActivitéLieu
8h30 – 9h00Café d’accueilSalle Aublanc
Quartier Marchand
9h00 – 9h15Ouverture / introductionSalle Aublanc
Quartier Marchand
9h15 – 10h001ère intervention La Répétition d’Eugène Chaperon, histoire d’un tableau de sa création à sa restauration par Monsieur Jean TARTARE
Questions
Salle Aublanc
Quartier Marchand
10h10 – 10h552e intervention La Danse (rite guerrier/social) par Monsieur Jean-Christophe PITARD BOUET
Questions
Salle Aublanc
Quartier Marchand
11h05 – 11h503e intervention Le chant dans la vie des soldats (histoire sociale) par le CNE (r) Adeline POUSSIN
Questions
Salle Aublanc
Quartier Marchand
12h00 – 14h00PauseMusée du sous-officier
14h05 – 14h504e intervention Le clairon Sellier par l’ADJ Damien CHARLIER et le CBA Eva RENUCCI
Questions
Salle Aublanc
Quartier Marchand
15h00 – 16h15Présentation musicale par le Quintet de cuivre de la musique des parachutistesSalle Aublanc
Quartier Marchand
16h15 – 16h45Clôture et synthèse par le CNE Just JOLIVETSalle Aublanc
Quartier Marchand
16h45 – 17h45Visite de l’exposition par le LTN Jean-Hugues LONGMusée du sous-officier

Saint-Maixent-l’École

Carte d’identité

Saint-Maixent-l’École est une ville de 7 200 habitants. Construite à partir d’un monastère fondé en 459 par le moine Agapit, elle se développe au long des siècles. Le nom de Rabelais, le protestantisme sont associés à son histoire. La cité possède un patrimoine architectural riche : son abbatiale bien sûr, mais aussi l’hôtel Balizy, l’hôtel Chauray, la porte Chalon, l’église Saint-Léger… Depuis 1880, on y trouve une importante école de formation de futurs officiers de l’armée de terre (l’ENSOA aujourd’hui). Du fait de cette implantation, Saint-Maixent a vu son nom se rallonger, elle est devenue en 1920 Saint-Maixent-l’École. C’est enfin la ville natale du colonel Denfert-Rochereau, défenseur de la ville de Belfort pendant la guerre de 1870-1871.

C’est donc tout naturellement, vu l’histoire militaire de la ville, que le Cercle généalogique des Deux-Sèvres a choisi Saint-Maixent-l’École comme cadre des prochaines Journées de la généalogie commémorant la guerre de 1870. Si tout se passe bien, ce que nous voulons croire, nous vous accueillerons durant 2 jours les samedi 9 et dimanche 10 octobre 2021 au quartier Marchand. Vous pourrez rencontrer tout au long de ce week-end des cercles de généalogie, des auteurs, des blogueurs, des associations culturelles, mais aussi voir des expositions, assister à des conférences, découvrir les travaux de nos adhérents, visiter le musée du sous-officier.

Saint-Maixent par le préfet Dupin vers 1800

ST.-MAIXENT, chef-lieu de canton et siège de deux justices de paix, est situé au nord-est et à 2 myriamètres 5 kilomètres de Niort. Sa population est de 4944 individus, dont un dixième protestant. Cette ville est bâtie sur le penchant facile d’une colline peu élevée ; elle est baignée par la Sèvre qui passe aux pieds de ses murs ; ses faubourgs sont traversés par la grande route de Paris à La Rochelle. Il y a neuf notaires, un receveur des domaines, un contrôleur des contributions, poste aux lettres, poste aux chevaux, école secondaire, hôpital, brigade de gendarmerie à cheval. Le seul édifice remarquable est la maison des ci-devant bénédictins, bâtiment vaste et superbe où l’on trouve encore des morceaux de sculpture d’un grand mérite. Il est affecté au logement d’une cohorte de la Légion d’honneur. On vient d’établir dans la maison de l’hôpital qui est bien entretenu un atelier de filature pour les indigents. Il y a des fabriques de serge, ras, frisons, ainsi que de bas et bonnets de laine. Ces dernières étaient autrefois très importantes.
Les terres labourables dépendantes de la ville sont fertiles et produisent froment, méteil, baillarge. Les prairies sont de 1812 ares et d’excellente qualité. Il n’y a qu’un moulin à eau, dit le moulin de Pont-Charaud. On admire les coteaux du Puy d’Enfer, d’où s’élance une nappe d’eau qui tombe dans un gouffre pour en ressortir et former un petit ruisseau. On remarque aussi une fontaine assez agréablement ornée, construite sur un point fort élevé de la grande route, par les soins de Mr. de Blossac, ancien intendant de Poitiers. Le commerce de Saint-Maixent consiste en bas, bonnets, grains, farine, moutarde et bestiaux. Il y a foire les 5 brumaire, 16 frimaire, 22 nivôse, 16 pluviôse, 4 ventôse, 19 idem, 9 germinal, 13 floréal et 27 fructidor ; marché tous les samedi.
La seule dépendance est la métairie de la Tour-quarrée.
La ville et territoire de Saint-Maixent se divise, pour les justices de paix, en deux sections. La ligne de démarcation part de rextrémité septentrionale du faubourg Châlons, traverse la rue du même nom , en passant devant l’Évêché, et va joindre la porte Charaud jusqu’à l’extrémité du faubourg de ce nom. Le territoire compris à droite de cette ligne, en entrant par la grande route de Paris, forme la première section ; et la deuxième est formée de tout le territoire compris à gauche de cette même ligne.

Les toponymes relevés par Bélisaire Ledain vers 1900

La Chapelle-de-Grâce, l’Enjaugerie, le Four-des-Pierres, la Grange-du-Portail, la Marotière, la Perrière-Maillochau (fief), Saint-Maixent, Tard-y-Fume, la Tour-Chabot, Valence (fief), la Viraudière.

Saint-Maixent sur la carte de Cassini

Actes dépouillés par le Cercle généalogique des Deux-Sèvres

-Baptêmes (paroisse de Saint-Léger) : 11314
-Baptêmes (paroisse de Saint-Saturnin) : 19182
-Naissances : 1365
-Fiançailles (protestants) : 129
-Mariages (paroisse de Saint-Léger) : 2795
-Mariages (paroisse de Saint-Saturnin) : 3679
-Mariages (protestants) : 5453
-Mariages (édit de tolérance) : 2061
-Contrats de mariage (notaires de Saint-Maixent) : 2698 + 1719
-Mariages : 559
-Sépultures (paroisse de Saint-Léger) : 7661
-Sépultures (paroisse de Saint-Saturnin) : 8567
-Sépultures (abbaye royale) : 78
-Décès : 1840

Sources

– Bélisaire Ledain Dictionnaire topographique des Deux-Sèvres. Éditions UPCP
– Claude Dupin Mémoires sur la statistique du département des Deux-Sèvres. Site Gallica
– Cartes postales : Archives départementales des Deux-Sèvres

Appel aux adhérents

Sans doute sommes-nous d’indécrottables optimistes. Nous voulons croire de plus en plus que nos Journées de la généalogie (autour du thème de la guerre de 1870) pourront se tenir les samedi 9 et dimanche 10 octobre à Saint-Maixent-l’Ecole.

Membre du CA en tenue de mobile sur le pied de guerre

Un repérage mercredi matin sur le site de l’ENSOA (le quartier Marchand) nous a rassurés : nous avons été très bien accueillis, la visite des lieux nous fait présager d’excellentes conditions pour les rencontres de cet automne. Dans le même temps, les différents travaux d’impressions sont lancés. Nous nous sommes remis sur le pied de guerre !

Nous aimerions que vous partagiez avec nous notre optimisme. Vous pouvez encore vous inscrire pour exposer gratuitement vos travaux généalogiques sous quelque forme que ce soit (arbres, écrits, photos, objets…). Il suffit de remplir et de nous renvoyer la feuille d’inscription sur notre site (onglet association / sous-onglet Assemblée générale et rencontres régionales).

Vous pouvez aussi vous proposer pour être bénévoles lors de cette manifestation. Nous aurons besoin de bonnes volontés pour installer, désinstaller, accueillir, guider, tenir les stands, assurer la convivialité… Il nous faudra donc des bras et des jambes, des cœurs et des cerveaux le vendredi 8, le samedi 9 et le dimanche 10 octobre. Si vous êtes libres un ou plusieurs de ces jours, si vous voulez aider et découvrir une équipe sympathique (si, si), n’hésitez pas : contactez nous par mail (genea79@orange.fr ou par courrier : Cercle généalogique des Deux-Sèvres, 26 rue de la Blauderie 79000 NIORT).

On compte sur vous !

PS pour les retardataires : vous avez jusqu’à dimanche pour voter pour notre assemblée générale à huis clos. Les documents pour le vote sont ici.

X comme « X »

Un texte de Stéphane Dallet

S’il désigne simplement le chromosome féminin en biologie, X a surtout des acceptions négatives. Quand il signifie anonyme, X est pathétique, laisse entrevoir un drame intime, (« né sous X »), une origine indicible, un scandale… X nomme l’innommable (le père inconnu), les parents de l’enfant trouvé. X sert encore à censurer, à masquer (« classé X ») l’obscénité, la violence, le sexe… Bref, X cache presque toujours un tabou : une absence, une naissance scandaleuse, des violences sexuelles, un crime odieux. Les quelques bribes de la vie de Mathurine DEVOYSE qui nous sont parvenues sont marquées par la violence, le malheur, le mystère évoqués par cette lettre de l’alphabet. L’histoire sans doute banale de cette femme pose aussi quelques problèmes au généalogiste, comme on le verra.

À l’été 1647, Mathurine DEVOYSE, fille de ferme du côté de St-Maixent, est victime d’un « rapt ». Si le rapt de violence est sans aucun doute au XVIIe siècle un crime « digne de mort par l’Ordonnance », comme le rappelle Furetière dans son Dictionnaire universel, le récit des faits présente la même ambiguïté qui fait qu’aujourd’hui encore, la justice, (la société), a du mal à définir le viol. La question, lancinante, reste la même : y a-t-il eu consentement ? On apprend que l’agresseur de Mathurine, qui a saisi la justice, « l’aurait par ses blandices (c’est-à-dire ses charmes trompeurs) fait condescendre à s’abandonner à lui ». Le prévôt de St-Maixent ordonne donc la « prise de corps » du don Juan et l’envoie en prison. En effet, on ne doute pas de la parole de la plaignante parce qu’elle est enceinte de son séducteur et doit déclarer sa grossesse aux autorités. Cela débouche sur « des actions civiles et criminelles » et, donc, sur une demande de réparation. Bientôt, alors que Mathurine « est à deux ou trois mois d’accoucher et n’a moyen de continuer lesdites poursuites », elle cède et transporte la somme de 60 livres obtenues en son « instance de rapt » à un nommé Jacques DUPUY, marchand laboureur à la Grange au Prieur de Pamproux, qui se chargera de recouvrer l’argent auprès du père de l’accusé. Le cessionnaire « promet bailler et payer à icelle dite Devoyse cédant savoir la somme de 30 livres tournois lors et au temps qu’elle sera accouchée du fruit dont elle est enceinte et la nourrir et entretenir et gouverner en ses gésines (autrement dit ses couches) ». La suite est plus inattendue puisqu’il est question de ne donner l’autre moitié (30 livres) qu’à la condition que Mathurine se marie « deux ou trois mois après ledit accouchement ou autre plus long ou moindre temps et même auparavant qu’elle fut accouchée ». Ainsi, la réparation est double : la fille déshonorée aura un mari, l’enfant du rapt un nom et un père légitime. En aucun moment on ne parle de marier la victime à son séducteur. La transaction aboutit très vite car dès le 12 janvier 1648, Mathurine DEVOYSE, dotée de ses 60 livres, conclut un contrat de mariage avec un journalier nommé François DESFORGES. L’enfant, née au mois d’avril ou de mai 1648, qui est probablement Françoise DESFORGES, portera le nom et le prénom de son père adoptif.

On trouve rarement de ces demandes de justice au grand jour qui équivalaient, pour les victimes d’agressions sexuelles, à mettre sur la place publique leur honte et leur déshonneur. En effet, comme l’écrit l’historien Georges Vigarello dans son Histoire du viol (XVIe – XXe: « Le viol est d’abord une transgression toute morale (…) il appartient à l’univers de l’impudeur avant d’appartenir à celui de la violence, il est jouissance illicite, avant d’être blessure illicite ». La victime est donc coupable elle aussi, de luxure (encore un X), « de stupre forcé ». De « corruption charnelle », disent les juges de St-Maixent. Combien de jeunes filles pauvres et vulnérables dans la société rurale de l’Ancien régime, n’ont jamais dénoncé leur agresseur, qu’elles fussent enceintes ou pas ? L’historien poitevin Fabrice Vigier, dans son étude intitulée À propos de quelques procès pour violences sexuelles dans le Poitou du XVIIIe siècle, n’a trouvé « que » 14 affaires de violences sexuelles sur plus de 3000 procès criminels intentés dans quinze juridictions poitevines au XVIIIe siècle, y compris le Siège présidial de Poitiers, la Prévôté royale de Melle et le Siège royal de St-Maixent. Ne nous étonnons pas ! D’après plusieurs enquêtes diffusées par la presse, un cinquième des victimes d’agressions sexuelles portent plainte aujourd’hui en France et seulement un dixième aboutit à une condamnation pour viol et ce, malgré l’effet MeToo et une prise de conscience quasi mondiale du problème… Enfin, on croyait sous l’Ancien régime (et on croit toujours dans certains milieux conservateurs farouchement anti-avortement) qu’une femme ayant subi un « vrai » viol ne peut tomber enceinte !

Gravure de Gerlier XIXe siècle

Mais revenons à Mathurine DEVOYSE. Elle a le profil typique des victimes de viol, tel qu’il ressort dans l’étude de F. Vigier, notamment. Jeune, pauvre, elle est servante dans des fermes du côté de Soudan, St-Georges-de-Noisné, Exireuil, relativement loin de son village d’origine – elle viendrait d’Availles-Thouarsais, ravagé par la « contagion » en 1631 – et vit donc loin de sa famille, si elle en a encore une. Ses parents Pierre DEVOYSE, un charpentier, et Marie LEVESQUE, morts au moment des faits, sont peut-être, eux-mêmes, des gens venus d’ailleurs puisqu’on ne rencontre guère le patronyme DEVOYSE en Poitou. Maîtresse de ses droits en 1648, vivant à la Coussaye de St-Georges-de-Noisné, elle épouse donc un journalier et laboureur, si démuni que la dot de la mariée, si dérisoire soit-elle, suffit à lui faire prendre la femme et le bébé à naître. Ils auront trois autres enfants au moins dont le dernier est baptisé en 1654 à Chantecorps. En 1669, Mathurine DEVOYSE est veuve avec ses deux filles et qualifiée de « mendiante » par les collecteurs de taille d’Exireuil. La situation s’améliore quand elle épouse en 1678 un voisin, peut-être le maître de sa fille, et veuf lui aussi : le maçon Pierre GUERAULT. Celui-ci fait inscrire au contrat que « considérant les bons plaisirs, traitements (…) que lui a toujours fait porter et rendre Charlotte Desforges fille deladite Devoise et dudit feu Desforges (…) lui donne un lit composé, une coiste, deux oreillers et quatre plats d’étain ». Cette convention de mariage, qui revient à une association entre deux vieillards, n’oublie pas la fille sans fortune restée célibataire. Ensuite, on ne trouve plus de trace de Mathurine DEVOYSE, à commencer par son acte de sépulture, ce qui ne signifie pas qu’elle ait quitté la région.

Le séducteur s’appelle Thomas BARRIQUAULT. Jeune également, il est le fils de Jean, un marchand laboureur de Soudan. On ignore si Mathurine DEVOYSE servait chez ses parents ou chez un voisin. On ne connaît pas non plus le rôle exact de Jacques DUPUY, avant qu’il devienne le cessionnaire de Mathurine. Mais il est fort possible que Thomas ait séduit la servante de la ferme en lui promettant le mariage, par exemple. Qu’il s’agisse d’un rapt de violence ou d’un rapt de séduction, l’abus de faiblesse est évident, de même que l’ascendant du jeune homme sur la servante. Or, la réponse juridique à ces deux types de rapt semble à peu près la même avant l’ordonnance sur les matières criminelles de 1670 qui, selon G. Vigarello, « fait du rapt par force et violence, contrairement au rapt de séduction, un cas royal échappant aux juges subalternes et soustrait à toute rémission de peine ». Avant cette date, la confusion entre les deux types de rapt est générale. Les déclarations de grossesse illégitime, imposées par l’édit d’Henri II de 1556, sont censées prévenir les infanticides et les avortements et impose aux femmes de dénoncer le père. Vigarello précise encore : « la déclarante fait de la violence une simple circonstance excusante, un fait rendant plus urgent l’arrangement financier et moins un fait imposant la condamnation de l’accusé. Elle transforme insensiblement le viol en récit de séduction plus qu’en récit de barbarie ». Les dictionnaires de Furetière (1690) et de l’Académie française (1694) confirment cet amalgame entre viol, rapt et séduction au XVIIe siècle, puisqu’ils n’ont pas d’entrée « violeur » (le terme est inusité), mais une entrée « séducteur » qui occulte la violence, évoquant, de nos jours, des figures relativement aimables comme Don Juan et Casanova plutôt que celle de Gilles de Rais. Quant au mot « rapt », il est employé à la place de « viol », mot plus cru, se confond avec le terme ambigu de « ravissement » et fait penser à des épisodes mythologiques ou historiques : les amours de Zeus, le rapt des Sabines, etc. Le langage utilisé masque la violence.

Le généalogiste est un optimiste. Non seulement, il veut croire à la vertu des aïeules (qui appartenaient à un temps où il n’y avait pas que des mariages d’amour), mais aussi il doit faire semblant d’ignorer qu’une généalogie comporte forcément des victimes d’abus, de viol, d’inceste. Et des violeurs… L’histoire sans doute banale de cette femme, découverte par hasard, pose aussi des problèmes au généalogiste. Si Françoise DESFORGES est la fille légitime de DESFORGES et, selon de fortes présomptions, la fille naturelle de BARRIQUAULT, faut-il la relier à l’arbre de ces derniers ou remonter la généalogie des DESFORGES ? Les généalogistes ne sont pas tous d’accord. D’ailleurs, aucun arbre généalogique ne tient devant la révélation d’un secret de famille ; les tests ADN en vogue actuellement anéantissent les efforts de bien des généalogistes.

Généalogie de Mathurine DEVOYSE :

Pierre DEVOYSE x Marie LEVESQUE
—- Mathurine DEVOYSE x François DESFORGES laboureur à Chantecorps et Exireuil
—-/—- Françoise DESFORGES x Michel GIRAULT laboureur à Augé
—-/—-/—-/—- Marie GIRAULT x Jean MENANT laboureur à Augé
—-/—-/—-/—- Françoise GIRAULT
—-/—-/—-/—- Jean GIRAULT journalier x1 Louise TIRE, x2 Françoise DAZELLE, x3 Marie GIRARD
—-/—-/—-/—- Marie Scolastique GIRAULT
—-/—- Jacquette DESFORGES x François ESNARD journalier à Vautebis
—-/—- Pierre DESFORGES
—-/—- Charlotte DESFORGES
—- Mathurine DEVOYSE x Pierre GUERAULT maçon à Exireuil

Remarque :

Le baptême de Françoise DESFORGES (peut-être célébré à St-Georges-de-Noisné où Mathurine vivait vers la fin de sa grossesse et dont les registres sont lacunaires) et le contrat de mariage sont introuvables. Son mariage n’est pas filiatif, mais l’acte de sépulture indique qu’elle est née vers 1648, comme l’enfant du rapt. D’autres indices – sa proximité avec les GUERAULT, l’absence d’autres DESFORGES dans la région d’Augé – rendent cette filiation probable.

Autre mystère : Jacquette DESFORGES baptisée sous ce nom le 29/07/1649 à Exireuil est nommée DEVOIS(E) par le curé de Vautebis sur l’acte de baptême de sa fille Françoise le 18/12/1682 et DESFORGES au baptême de ses autres enfants ! Pourtant, Jacquette n’est pas l’enfant du rapt qui est né au printemps 1648. La légitimité des enfants du couple DEFORGES x DEVOISE a-t-elle été contestée ?

Sources :
– Archives départementales des Deux-Sèvres : registres paroissiaux, archives notariales (3E 531, 3 E 1908)
– Georges Vigarello, Histoire du viol (XVIe-XXe siècles), Paris, 1998, Éd. du Seuil,
– Fabrice Vigier, « À propos de quelques procès pour violences sexuelles dans le Poitou du XVIIIe siècle » in Le corps en lambeaux. Violences sexuelles et sexuées faites aux femmes, Rennes, 2016, Presses universitaires de Rennes, collection Histoire.

Exposer aux journées de la généalogie de Saint-Maixent-l’École

affiche avec marge normale allégéeVous êtes adhérent du Cercle généalogique des Deux-Sèvres. Vous aimeriez participer à la vie de notre association et présenter à d’autres passionnés vos travaux, votre arbre, des photos ou tout autre document ou objet ayant un rapport avec votre généalogie.

Si c’est le cas, les futures journées de la généalogie, les 3 et 4 octobre 2020 à Saint-Maixent-l’École (quartier Marchand) sont faites pour vous ! Vous pouvez y être exposant le samedi, le dimanche ou sur les deux jours. C’est bien sûr gratuit pour les adhérents. Pour cela, il suffit de remplir le document en ligne sur notre site (onglet association, sous-onglet assemblée générale et rencontres régionales) et de nous le renvoyer avant le 30 avril 2020. Nous vous réserverons alors un emplacement (table, chaise et grilles). Vous pourrez en plus, sur ces 2 jours, profiter de la présence des autres exposants (adhérents, professionnels, Cercles, associations, auteurs, blogueurs…), assister aux conférences,vous instruire en regardant les différentes expositions consacrées à la Guerre de 1870, visiter le musée du sous-officier.

Catherine de Médicis abjure sous Louis XIV !

En feuilletant* les registres de la paroisse Saint-Saturnin de Saint-Maixent, vous rencontrerez peut–être plusieurs fois cette belle signature bien lisible de Catherine de Médicis.

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Catherine de Médicis, atelier de François Clouet

Comme de plus cette signature se retrouve sur des actes d’abjuration, on peut se poser légitimement la question : est-ce que la terrible ennemie des huguenots ne serait pas venue dans  notre région vérifier in situ l’efficacité de son action contre la « religion prétendument réformée » ?

Malheureusement, ce qui aurait pu être une belle découverte est une fausse piste. Les dates des actes où elle signe (après 1683) permettent d’éliminer très rapidement cette hypothèse : l’épouse d’Henri II, mère de 3 rois, est morte un siècle auparavant (1519-1589). Il s’agit donc d’une homonyme, née vers 1644 et décédée en 1709.

Ce qui est toutefois amusant, c’est que notre Catherine de Médicis est issue d’une famille protestante où se retrouvent des apothicaires, des chirurgiens… bien à l’opposé des idées de la reine. Baptisée protestante vers 1644, elle a été forcée d’abjurer comme ses parents, Jean de Médicis et Louise Maye l’ont fait en 1681 en l’église Saint-Léger de Saint-Maixent. L’acte pour Catherine semble malheureusement introuvable.

Même si la nouvelle n’est pas toute récente, Généa79 est très quand même fier d’être le premier à dévoiler ce scoop : Catherine de Médicis a abjuré sous Louis XIV à Saint-Maixent !

*Merci à Nat qui m’a mis sur la piste.

Une maison chargée d’histoire

tonneauUn petit mot pour vous inviter à lire le document du mois d’octobre (je suis en retard) des Archives départementales des Deux-Sèvres, réalisé en association avec un lecteur, M. Menzago. Nous voyons quelles recherches et quelles trouvailles peuvent être faites autour d’une maison. L’habitation mise en valeur se situe à Saint-Maixent-l’École et nous en découvrons les propriétaires au XVIIe et début du XVIIIe siècles. Nous apprenons aussi l’existence autrefois de vignes dans la région, et les aménagements de la maison liés à cette activité.

Un bel exemple de recherches sur une maison, à mener en salle aux Archives départementales !

Le fonds Dez

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L’édit de Versailles (source Wikipédia)

L’édit de Versailles est un édit de tolérance signé par Louis XVI le 7 novembre 1787 et enregistré au parlement le 29 janvier 1788, qui permit aux personnes non-catholiques de bénéficier de l’état civil sans devoir se convertir au catholicisme.

Aux archives Nationales, sous la cote U1339, existe un registre des non-catholiques de Saint-Maixent en Poitou pour l’année 1788. Il recense « les déclarations de naissance, mariage et enterrement de ceux qui ne font pas profession de la religion catholique. » Il est paraphé par Jacques Robert François Marie NOSEREAU, Conseiller du Roi, Lieutenant général de la sénéchaussée et siège royal de Saint-Maixent.

Le fonds de Pierre DEZ, cote 2J45, consultable aux Archives départementales des Deux-Sèvres, est un relevé dactylographié (253 pages !!!) du document précédent. Depuis aujourd’hui, vous pouvez accéder sur notre base de données au relevé des mariages (2061 actes). Si on fait une recherche avancée par communes, il faut chercher à « Saint-Maixent (édit de tolérance) ».  Il se peut que certains mariages soient aussi enregistrés dans les registres des pasteurs.

Il est par ailleurs très intéressant de consulter directement le document aux Archives, car on y découvre en plus la composition des familles au moment des déclarations.