Les pierres tombales de l’église Saints-Eutrope-et-Martin de Availles-sur-Chizé

La commune d’Availles a été rattachée à celle de Chizé en 1973. L’église d’Avallia dépendait de l’abbaye de la Trinité de Vendôme par suite d’une donation de la comtesse Agnès, en 1040.

Sous des apparences toutes simples, l’église dénote une histoire complexe. Elle a gardé le plan général des petites églises romanes, et leur pauvreté : nef en moellons, prolongée par une travée droite plus étroite, puis par une abside en hémicycle, après un nouveau ressaut. S’est greffé tardivement sur l’entrée sud un balet n’ouvrant que par une porte en plein cintre. Le tout est sous un unique toit de tuiles creuses d’où ressort seulement un petit campanile ajouté sur la façade condamnée, avec sa cloche de 1868.

Les contreforts ajoutés après coup et qui masquent une partie des trois baies romanes de l’abside se comprennent bien, vu la vétusté des murs dont le dévers se remarque aussi de l’intérieur. Le besoin de lumière a provoqué le percement de plusieurs baies gothiques.

La charpente et l’éclairage rénovés, la mise en valeur de l’appareillage des pierres blanches dans le chœur, montrent l’intérêt des communes pour leur patrimoine.

On trouve au mur de l’abside un blason marqué de trois clefs, armoiries de la famille CHEVALIER de la Coindardière.

Dans le beau dallage de pierre se trouvent cinq plates-tombes,

  • Une première, située à droite en entrant avec juste une croix gravée,
  • Une deuxième avec une épitaphe, située à droite,
  • une troisième à gauche avec une épitaphe et une croix gravée,
  • une quatrième avec une épitaphe, dans l’allée centrale, celle de Louis Armand de Rougemont (†1731),
  • La cinquième pierre tombale, accolée à la précédente, avec une épitaphe et une croix, celle de Jean Veillon, prêtre  (†1685)

La première pierre tombale est  située à droite en entrant avec juste une croix gravée :

La deuxième pierre tombale, située à droite, dont l’épitaphe est partiellement lisible :

CI GIST LE CORPS

DE BECAULE ES…

DELAFOCION QUI

DECEDA LE 12 DE JA

NVIER 1638  …

Les registres de sépultures d’Availles-sur-Chizé en ligne ne commençant qu’en 1672, je n’ai pas trouvé l’acte de sépulture.

Une troisième pierre tombale à gauche avec une épitaphe et une croix gravée est certainement celle d’un prêtre :

CY GIS LECORPS

FRANCOIS NA

VALA PRETRO

… LE DEUX

 OCTOBRE

1645

Je n’ai pas trouvé l’acte de sépulture pour les raisons évoquées plus haut.

La quatrième pierre tombale située dans l’allée centrale est celle de Louis Armand de Rougemont (†1731), décrite dans le livre Mémoires/Société Historique et scientifique des Deux-Sèvres 10eme année 1914.

CY GIST LE CORPS

DE MESSIRE LOUIS

ARMANT DE ROUGE

MONT CHEVALLIER

SEIGNEUR DE LARC

AGE DE 24 ANS

INHUME LE I JUIL          

1731

Cette pierre tombale a fait l’objet d’un dessin n° 220 par Arthur Bouneault, responsable du musée lapidaire de Niort, référencé dans le Livre Mémoires Société Historique des Deux-Sèvres du 01 janvier 1914 :

« 106. Eglise, plate-tombe, avec épitaphe non armoriée, de Louis-Armand de Rougemont, XVIIIe s. [220 ».

Dessins numérisés par la Médiathèque de Niort

J’ai trouvé dans les registres d’Availles-sur-Chizé l’acte de sépulture du 2 juillet 1731 :

Aujourd’hui deuxième juillet mille sept cent trente un a été enterré dans notre église le corps de Messire Louis Armand DE ROUGEMONT écuyer, chevalier seigneur de Larey en touraine paroisse de Neully Le Noble , fils de feu messire Louis de ROUGEMONT seigneur de Larey et de feu Dame Anne CHEVALIER DE SCAUX et ce en présence des …ines, après avoir reçu les sacrements nécessaires à salut.

BMS 1698-1741

https://archives-deux-sevres-vienne.fr/ark:/58825/vta584ec66abfdfb193/daogrp/0/71

Louis Armand de ROUGEMONT, écuyer, était le fils de Louis DE ROUGEMONT, sieur de Larey et d’Anne-Marie CHEVALIER. 

Selon  les Mémoires de la Société archéologique de Touraine (Auteur : Société archéologique de Touraine Edité en 1867),  on trouve des ROUGEMONT (de), Chev, Sgrs de Rougemont, de Larsay (paroisse de Neuilly-le-Noble), de la Voirie, (paroisse d’Abilly), de la Guerrière, de la Tournière, de Berault (XVII e et XVIII e siècles).

Anne-Marie CHEVALIER  était, elle,  la fille de Jacques CHEVALIER, écuyer, seigneur de Sanxay, de Saulx et de Leugny  et de Françoise PETIT, Dame de la Guierche Saint-Amand. Elle faisait partie de la famille CHEVALIER DE LA COINDARDIERE , dont le blason marqué de trois clefs, figure sur le mur de l’abside de l’église d’Availles-sur-Chizé (cf. photo plus haut). Le château de la Coindardière est situé vers Sanxay (Vienne).

Selon le Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou. Tome 2 / Beauchet-Filleau : Les CHEVALIER DE LA COINDARDIÈRE, DE LA FRAPPINIÈRE, DE SCEAUX,etc. sont une Famille d’ancienne noblesse originaire de St-Maixent, dont la filiation remonte au XIVe siècle. Il semble, d’après les renseignements fournis par divers documents, qu’elle faisait d’abord partie de la haute bourgeoisie de cette ville et qu’elle fut anoblie seulement à l’époque des guerres des Anglais, comme les CHAUDRIER, les POUSSARD et autres familles considérables du Poitou et de l’Aunis. Les CHEVALIER ont donné 2 abbés de St-Maixent au XIVe siècle et un évêque d’Alais au XVIIe, plusieurs Chevaliers de St-Jean-de-Jérusalem, dont l’un fut reçu au commencement du XVIe siècle, et plusieurs autres personnages distingués. Cette famille possédait le titre de fondateur de l’église de Nanteuil près St-Maixent (D.-S.), et l’on voyait autrefois les tombeaux armoriés de plusieurs de ses membres dans le chœur de cette église, tandis que son blason était sculpté ou peint aux clefs de voûte et sur la litre seigneuriale qui entourait l’édifice. … Cependant ce titre de fondateur ne paraît pas remonter au-delà du XVe siècle et a pu être acquis par la restauration de l’édifice. A cause de la Coindardière, les Chevalier possédaient aussi la chapelle du Rosaire dans l’église de Sanxay (Vien.), où l’on voit encore leurs armes sculptées à la voûte.

Blason: de gueules à 3 clefs d’or posées 2 et 1, l’anneau en bas. Dans les preuves de Malte faites en 1612, on ajoute: «l’écu entouré d’une bordure d’azur » (brisure de cadet).

La branche de la Frappinière portait, au XVIe siècle, l’écu entouré d’une bordure engreslée et brisé d’un lambel de 3 pendants en chef. Un sceau de François Chevalier, Ec., sgr de la Frappinière (8° deg.,§ IV), apposé à un aveu du fief des Vigneaux du 18 juill. 1582 (Arch. de la Frappinière), porte l’écu à bordure engreslée avec un lambel en chef et 3 clefs rangées en pointe. Mais il s’agit ici d’une maladresse du graveur. Quelquefois on trouve les 2 clefs du chef adossées; mais le type primitif et régulier se voit sur un sceau de Jean Chevalier, abbé de St-Maixent, apposé à un acte du 29 oct. 1446 et dessiné par Gaignières au XVIIe siècle. (Bibl. Nat. Fonds Français 20395, 133).Ce sceau porte au bas la figure de l’abbé à genoux entre 2 écussons chargés de 3 clefs, 2 et 1. Cet écusson se voit aussi dans l’église de St-Maixent.

L’origine de ce blason nous paraît remonter à une alliance avec l’héritière d’une branche des Grignon qui possédaient à St-Maixent au XIVe siècle un fief important relevant de la baronnie, appelé le Fief-Grignon, qui passa aux Chevalier dès le commencement du XVe siècle. (Les 2 familles Grignon et Chevalier ont des armes absolument pareilles.) On a pensé parfois que les 3 clefs étaient un souvenir de la garde des clefs de la ville de St-Maixent confiées à Huguet Chevalier en 1361 par le prince de Galles. (V. 1er deg., § I.) Mais nous croyons plutôt que le blason vient de l’alliance des Grignon. Un blason peint à la suite des preuves de Malte faites en 1612 par Jean Chevalier de la Coindardière est écartelé :

1° de gueules à 3 clefs d’or et à la bordure d’azur (Chevalier);

2° d’argent à 3 trèfles de sable (Gazeau) ;

3° de gueules à 3 clefs d’or et à la bordure d’azur (Grignon);

4° d’azur au pélican d’or (d’Ausseure).

Effectivement Anne-Marie CHEVALIER a eu pour arrière-grands-parents Philippe CHEVALIER, écuyer, seigneur  de la Coindardière, du Thay et de Viron, page de la reine-mère en 1576 et de Charlotte GRIGNON, fille d’Antoine, écuyer, seigneur de la Pelissonnière, et de Charlotte d’Ausseure.

Mais pourquoi une inhumation dans l’église d’Availles-sur-Chizé ?

Un des oncles d’Anne-Marie CHEVALIER, François CHEVALIER, né en 1643, est dit âgé de 24 ans et « prieur d’Availle » dans un acte du 22 oct. 1667. Il était en 1670 bachelier en théologie de la maison de Sorbonne et prieur de Chizé. S’étant fait remarquer par son zèle pour la conversion des protestants et sa grande prudence dans cette mission difficile, il fut dès 1687 choisi par Louis XIV pour occuper le siège d’Alais.

La cinquième pierre tombale est accolée à la précédente : c’est celle de Jean VEILLON « prestre d’Availe cui désida le 6 de mars 1685 ».

Je n’ai pas trouvé trace de l’acte de sépulture de  Jean Veillon dans les registres d’Availles-Sur-Chizé qui comportent des lacunes sur les années 1682-1685.

Par contre j’ai trouvé un premier acte de baptême en date du 01 novembre 1672 avec la signature de « J VEILLON, curé d’Availle » et un dernier acte de sépulture en date du 26 décembre 1681 avec la même signature :

Par ailleurs lors de mes recherches en cours sur les multiples pierres tombales de l’église de Chizé, dont plusieurs de la famille GIRARDON (dont une description est donnée dans le Dictionnaire historique et généalogique des Familles du Poitou – T4 Auteur : H. Beauchet Filleau), j’ai trouvé dans les registres d’Availles-sur-Chizé, les actes de sépultures de :

  • Elie Jacques GIRARDON, écuyer, sieur des Ecurolles, conseiller du roi, président au siège royal des traites foraines à Niort et lieutenant particulier de la maîtrise des eaux et forêts de Chizé : ce dernier est décédé le 15 décembre 1716, âgé de soixante-dix ans et a été inhumé dans la chapelle de l’église d’Availles-sur-Chizé.
  • Louis GIRARDON, dit aussi Jacques, fils du précédent, seigneur des Ecurolles, du fief Sallebart (Séligné, D.-S.), et Savarien ? (Availles-sur-Chizé, D.-S.), prêtre, prieur, curé de Dampierre sur-Boutonne (Char.-Inf.) : il décéda aux Ecurolles le 29 sept. 1743 et fut inhumé dans la chapelle de l’église d’Availles-sur-Chizé.
  • Henri GIRARDON, frère du précédent, écuyer , seigneur de la Fortranche (Exireuil, D.-S.), puis à la mort de son frère Louis, des Ecurolles, du fief Sallebart et Savarien. Ancien page des rois Louis XIV et Louis XV, il fut successivement officier au régiment d’infanterie de S. M., aide de camp du maréchal Comte de Saxe, chevalier de l’ordre royal de Prusse et colonel d’infanterie, et demanda en 1711 à l’intendant de la généralité de Poitiers décharge ou modération de l’impôt du 20e (Arch. Vien. C. P.) Il mourut sans alliance au château des Ecurolles le 14 nov. 1774 et fut inhumé dans la chapelle de l’église d’Availles-sur-Chizé.

Je n’ai pas trouvé la trace de leurs pierres tombales dans l’église d’Availles-sur-Chizé.

Cartes de Cassini :

Availles-sur-Chizé
La Coindardière

Sources :

  • Availles-sur-Chize.pdf  Extrait du livre de Jacques Lefebvre, Les églises du Mellois, Poitiers, éd. Gilbert de La Porrée, 2008, p. 16. © PARVIS – 2019 Centre théologique de Poitiers www.poitiers.catholique.fr/parvis
  • Livre Mémoires Société Historique des Deux-Sèvres du 01 janvier 1914 : Dessins d’Arthur Bouneault, responsable du musée lapidaire de Niort. Dessins numérisés et transmis par la médiathèque de Niort.
  • Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou. Tomes 2 et 4 / Beauchet-Filleau 
  • Mémoires de la Société archéologique de Touraine (Auteur : Société archéologique de Touraine Edité en 1867)
  • Cartes de Cassini : Feuille 101 La Rochelle : le sud-ouest (Niort, Mauzé, Brioux…)
  • et Feuille 67 Poitiers : l’est (Airvault, Thénezay, Ménigoute…)

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