U comme Usseau, Ussolière, Uxellois, Uxelloise…

Un texte de Monique Bureau

Tout naturellement m’est venue l’idée de vous parler d’une femme de ma famille maternelle : Marie MILLORY, aux multiples alias (MILLIARIT, MILLIORIT, MILLORIT…) : Marie, née vers 1692 a vécu avec son mari Jacques CLEROUIN à Thorigny-sur-le-Mignon dans les années 1713-1716 puis à partir de 1720 au village d’Ussolière à Usseau où ils sont décédés tous les deux en 1787 et 1758.

Lors des premières recherches généalogiques faites par mon oncle maternel dans les années 1980, Marie MILLORY avait retenu toute son attention. Avec un tel nom, elle ne pouvait être qu’Anglaise ! Cela le faisait rêver. Les différents documents, actes qu’elle nous a laissés et transmis de génération en génération, nous montrent une femme, qui même veuve à 70 ans, n’hésitait pas à lancer des procédures, notamment à l’encontre de ses voisins. Marie, « la procédurière », c’est le surnom que lui attribuaient mon oncle et mes cousins. Mon oncle n’avait pas réussi à remonter la généalogie de ce couple. À l’heure de la retraite, un peu par hasard, je suis repartie des travaux de mon oncle, j’ai pris connaissance des documents, actes… transmis à mes cousins, et, il y a quelques mois, j’ai pu remonter la branche MILLORY avec de belles découvertes en Charente-Maritime et Deux-Sèvres.

Ma branche maternelle est originaire de la Chaussée de Saint-Félix, en Charente-Maritime, et au fil de mes recherches, j’ai découvert une multitude de branches dans les Deux-Sèvres, dont une au village d’Ussolière à Usseau, situé à quelques kilomètres de la Chaussée de Saint-Félix ; on traverse Usseau quand on va à Niort depuis la Chaussée de Saint-Félix.  Cette route est tracée sur l’ancienne voie romaine qui allait d’Angers à Saintes : la chaussée toujours droite et généralement plus élevée que les terrains riverains est presque partout reconnaissable ; elle a laissé son nom aux villages de la Chaussée de Marsais et la Chaussée de Saint-Félix. Ma grand-mère nous racontait que, lorsqu’elle était jeune et qu’elle faisait son apprentissage de couturière à Usseau, elle faisait la route à pied deux fois par semaine, et avec ses copines apprenties, elles avaient peur de faire de mauvaises rencontres !

Lieu de passage entre la plaine d’Aunis, le Marais poitevin et la mer, Usseau dérive de « Ussena » signifiant une butte plantée de vignes. Rattachée au canton de Mauzé-sur-le-Mignon, la commune est composée de cinq hameaux surnommés localement les « écarts » : Antigny, le Grand-Breuil, Olbreuse, le Plénisseau et Ussolière.

Usseau, qui s’écrit de multiples façons dans les registres paroissiaux (Ussaud, Usseau, Usau, Hussaud…) est surtout connu pour une Uxelloise renommée : ancien centre huguenot, Usseau est le berceau d’Éléonore Desmier née en 1639 à Olbreuse et épouse du duc de Brunswick-Lunebourg-Zell, électeur de Hanovre. Sa descendance est présente dans dix-sept dynasties européennes, d’où son surnom de « grand-mère de l’Europe ». Françoise DESMIER, arrière grand-tante d’Éléonore DESMIER décédée le 21 juin 1610, a été inhumée dans l’église Saint-Pierre d’Usseau selon Christian Simon, qui a recensé, dans son livre « USSEAU dans l’histoire » [1], plusieurs pierres tombales.

Mais revenons à mon ancêtre Marie MILLORY : elle était la fille de François MILLORY, charpentier de navires à Rochefort et de Francoise BAILLIT : Françoise BAILLIT était native « d’Usau », comme le précise son acte de mariage à Rochefort le 23 avril 1690. Françoise, baptisée le 23 juin 1665 à Usseau, est dite « fille de François BALLY garde de Monsr de Montassier et de Françoise GENAUD, a été parrain Pierre GIRON Sieur de Gifardiere » (qui signe).

Acte de baptême de Françoise Baillit

Françoise GENAUD, mère de Françoise, avait épousé en secondes noces Charles GENEAU ; ce dernier est dit tuteur des enfants du premier mariage de Françoise : un document de famille en notre possession et dont j’ai pris connaissance dernièrement indique l’existence « d’un acte de partage de juin 1680 d’entre Françoise GENEAU femme non commune de Charles GENEAU se disant tuteur des enfants d’un premier mariage avec François BAILLY, Marie BAILLY femme de François RESNEAU, Pierre SERVANT et Louise BAILLY sa femme, François MILLORY et sa femme Françoise BAILLY. »

Francoise BAILLIT avait donc au moins un frère François et deux sœurs Louise et Marie :

 – François BAILLIT a été baptisé le 9 février 1671 à Usseau : « a été présenté sur les fonts baptismeaux de Saint-Pierre d’Usseau François fils de François BAILLIF et de Françoise GENELLE ses père et mère ont été parrain et marraine François de CURSAY et honneste femme Marie CARDINAU », qui signent. Le parrain est François de CURSAY, écuyer, sieur d’Oléron : on le retrouve sur un autre acte figurant dans le registre d’Usseau le 17 octobre 1667, avec la même signature, complétée de la mention « ecuier sieur d’Olleron ». Hasard des recherches généalogiques, j’ai trouvé plusieurs fois François de CURSAY comme parrain lors de recherches en Charente sur ma branche paternelle !

Acte de baptême de François Baillit

– Louise BAILLIT, née vers 1664, avait épousé Pierre SERVANT, maître : leur fils Pierre épousera à Usseau le 20 juin 1717 Marie VIAULT, petite-fille de François FOURRE DE DAMPIERRE, chevalier, sieur de Beaulieu, abbé de Dœuil-sur-le-Mignon et de dame Marie CHARON et également petite-fille d’Emmanuel VIAULT, sergent royal à Usseau, et de dame Luce CARDINAULT. Le sergent royal est une sorte d’huissier ou officier chargé  de faire respecter l’ordre public et de faire exécuter les décisions de justice. Emmanuel VIAULT a été inhumé en 1672 dans l’église d’Usseau [1].

François MILLORY, baptisé en 1665 à La Rochelle, est, lui, issu d’une lignée de charpentiers de navires de La Rochelle qui, pour certains, ont navigué vers l’Amérique : son père, protestant, avait abjuré en 1661 à La Rochelle. François avait notamment un frère Charles, marchand à La Rochelle,  qui est qualifié de « trafiquant aux isles de la mérique » dans l’acte de naissance de sa fille Marie en 1703.

Acte d’abjuration de François Millory

François MILLORY et Françoise BAILLIT ont eu deux filles et un garçon : Marie, mon ancêtre, Pierre (né en 1691 à Rochefort) et Madeleine (née et décédée à Rochefort 1693-1698). François MILLORY, charpentier de navires à Rochefort est décédé avant 1705, peut-être le 9 décembre 1703. Sa femme Françoise avait épousé en secondes noces en 1705 à Rochefort un matelot François GANOT et est décédée le 17 juin 1718 à Rochefort, à l’âge de 52 ans.

Acte de baptême de Marie Millory

Mes ancêtres Jacques CLEROUIN et Marie MILLORY se sont installés à Usseau entre 1713 (naissance de leur fils à Thorigny) et 1720 (naissance de leur fille à Usseau), certainement suite au partage des biens au décès de la mère de Marie en 1718, car dans l’acte de partage de 1680, il est indiqué qu’était échu à François MILLORY et sa femme une petite chambre … Le couple a eu cinq filles et trois garçons :

  1. François, baptisé à Thorigny le 5 novembre 1713, décédé le 30 septembre 1714 à Thorigny.
  2. Marie, baptisée à Thorigny le 16 avril 1717.
  3. Louise, baptisée à Usseau le 16 juin 1720.
  4. Marie, baptisée à Usseau le 27 septembre 1723, s’est mariée une première fois à Usseau le 5 février 1743 avec René ROUHIER, tisserand ; ils ont eu six filles et deux garçons. Elle s’est mariée en secondes noces à Jean DIEUMEGARD, également tisserand, le 15 février 1768 à Marsais et est décédée à Marsais le 4 novembre 1807, âgée de 89 ans.
  5. Jacques, mon ancêtre, baptisé le 5 décembre 1725 à Usseau : laboureur à bœufs, marchand, il a épousé Élisabeth DURAND le 23 août 1756 à Marsais. Le couple a eu quatre garçons et six filles. Il est décédé le 4 février 1811 à Marsais à 85 ans, elle, le 21 octobre 1772 à Priaires à 41 ans.
  6. Magdeleine, née vers 1725, décédée le 13 mai 1807 à Ussolière, âgée de 82 ans : c’est en partie grâce à elle que j’ai pu remonter la généalogie de Marie MILLORY, Magdeleine était citée comme témoin en tant que cousine au 3e degré au mariage de sa cousine Louise SERVANT en 1771.
  7. Françoise, née vers 1735, a épousé le 22 février 1762 à Usseau Charles Alexandre GUILLOT, marchand farinier et est décédée le 28 septembre 1819 à Ussolière âgée de 84 ans.
  8. Jean, cité dans le contrat de mariage et l’acte de mariage de son frère Jacques.

Marie avait eu, en 1774, un litige avec sa voisine Jeanne SABOURIN, veuve de Pierre MARIE, de son vivant tisserand. Jeanne SABOURIN et son mari avaient acquis une maison et un terrain venant des BAILLY. Ce litige portait sur des ouvertures de fenêtres non autorisées, un métier de tisserand qui frappait le mur mitoyen et avait fait tomber des pierres, et enfin un problème lié aux branches d’un noyer qui tombaient sur le quereux de Marie MILLORY ; il  a donné lieu à de nombreux échanges, réponses et jugements, dans lesquels les juristes de l’époque s’interrogeaient, notamment pour le premier point, sur quel droit s’appliquait à Usseau, situé à la frontière du Poitou et de l’Aunis : la Coutume du Poitou ou le Droit du Parlement de Bordeaux, car les contraintes n’étaient pas les mêmes !

Marie MILLORY est décédée à Usseau le 5 décembre 1787 à l’âge de 95 ans ! Belle longévité pour l’époque. Je n’ai pas encore trouvé ses actes de naissance et de mariage.

Acte de sépulture de Marie Millory

Son époux Jacques CLEROUIN, laboureur, bouvier, marchand, né vers 1688, est décédé à Usseau le 5 juillet 1758 à l’âge de 70 ans. Il avait un frère Claude et une sœur Marie qui se sont mariés et ont vécu respectivement à Dœuil-sur-le-Mignon et Marsais. Certainement un lien avec les nombreux CLEROUIN que l’on trouve sur Marsais.

Acte de sépulture de Jacques Clerouin

Donc des recherches à poursuivre : mariage de Marie et Jacques, parents de Jacques… Et  peut-être encore de belles découvertes !

Sources :

[1] – Livre de Christian Simon « USSEAU dans l’histoire » Imprimé par les éditions Dumas à Niort – novembre 2014.
[2] – Actes d’abjuration, naissance et décès : AD 79 en ligne, AD 17 en ligne.
[3] – Photo personnelle « Panneau Ussolière ».

4 commentaires sur « U comme Usseau, Ussolière, Uxellois, Uxelloise… »

  1. Nous nous rejoignons chez les charpentiers de navire de Rochefort. Je vous recommande le livre de Viaud et Fleury « Histoire de la ville et du port de Rochefort » ancien mais intéressant, et téléchargeable gratuitement en ligne.

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